Falicon, Nice

4e partie : démembrement


   
<= 3e partie




Démembrement des propriétés Gastaud

Lorsque André Gastaud meurt en 1821, son seul héritier direct est son frère aîné Honoré, qui s'était réfugié en Piémont pendant l'occupation. Le petit-fils de celui-ci, le banquier Honoré Gastaud, héritera, à terme, de la totalité des terres.
En 1847, ainsi, Honoré Gastaud devient propriétaire d'un domaine de 25 hectares (dont le père garde l'usufruit). Il fait aménager un jardin exotique autour de la maison, agrémenté d'une serre, de rochers, de grottes artificielles, etc.
À la mort de son père en 1867, il agrandit encore son domaine. Mais voici que le banquier fait faillite (1869-1870). Ses biens sont mis aux enchères.

La plupart des terres sont rachetées en 1871 par Ernest Gambart [ci-contre, portrait par John Prescott Knight], homme d'affaires belge naturalisé britannique, marchand d'œuvres d’art et consul d'Espagne à Nice.

Villa Les Palmiers

En 1872, Ernest Gambart remplace la traditionnelle villa des Palmiers par l'imposant Palais de Marbre (aujourd'hui Archives municipales, au sein de la résidence des Grands-Cèdres).
Les terres de ce domaine s'étendent très loin en-deçà de la voie ferrée, comme on peut le voir sur le plan détaillé ci-dessus : tout autour des îlots Falicon (y compris la maison attenante au moulin à huile), tout autour de l'église, à l'exception d'un pâturage qui reste public et, bien sûr, de l'église et du vaste terrain militaire de la batterie (aujourd'hui hôtel Radisson).
Outre le Palais de Marbre et les jardins avec leurs nombreuses statues et faux rochers, il reste le colombier [313] et des vestiges de serres.

  

     






 
Château de Barla


De même, Ernest Gambart rachète le château de Barla, construit avant 1870 par Gastaud. Il a un style composite qui emprunte à la fois au gothique et au classicisme, avec une tour carrée caractéristique.
Gambart revend le château en 1874 au britannique George Bishop, qui le modifie pour lui donner un style "troubadour".



Un peu plus haut : le Château de Fabron est un terrain de Gastaud également acquis par Gambart, qui le revend en 1879 au duc Ernest II de Saxe-Cobourg-Gotha. Le château proprement dit a disparu depuis, et ce terrain, acquis par la ville en 1956, est devenu le parc Carol-de-Roumanie, ainsi baptisé en l'honneur de son dernier propriétaire, le roi Carol II, fils de la reine Marie de Roumanie (née princesse de Saxe-Cobourg-Gotha et du Royaume-Uni).

Il reste tout de même un vestige du temps de Gambart : une maison rurale [254] construite en 1873 dans une oliveraie du Château de Fabron. Peut-être donne-t-elle une idée de ce que pouvaient être les bâtisses des Falicon en bord de mer.

   


La villa Blanc


Cette partie de la propriété Gastaud a été achetée en 1871 par François Blanc, créateur du casino de Monte-Carlo.
En 1882, son fils Edmond Blanc fait bâtir une villa, qu'il baptise Château Sainte-Hélène.
Le bâtiment existe toujours, mais il a été considérablement modifié (après de nombreux rachats et transformations, la villa a été rachetée en 1973 par la ville de Nice pour y installer le musée d’Art naïf Anatole-Jakovski, ouvert en 1982).

musée international d'art naïf anatole jakovsky

Sur les terrains Gastaud se trouva aussi, par la suite, le Château Sainte-Anne, aujourd'hui remplacé par une résidence du même nom et par le parc de l'Indochine.




En 1876, l'ensemble des propriétés Falicon-Laugier sont rachetées par l’État français (administration des Ponts et Chaussées).
Le 28 octobre 1876, Louise épouse Louis Cagnoli, d'une famille d'ébénistes des nouveaux quartiers de Nice sur la rive droite du Paillon. Élie Ferdinand Cagnoli, frère du marié, est témoin.

Le 14 juillet 1877, Joséphine épouse Élie Ferdinand, dont la première femme vient de mourir. Louis Cagnoli est témoin.



Le 18 août 1877, décès du cousin aubergiste Jean-Paul Falicon (maison Verola).

Blessé dans les campagnes napoléoniennes lorsqu'il avait 20 ans, il a reçu la "médaille de Sainte-Hélène", ordre créé par Napoléon III en 1857.

Il est inhumé au cimetière de Caucade, créé récemment non loin de là, à flanc de colline (carré 1, emplacement 399).


Son fils Maurice l'y suivra en 1904.
La pierre a été remplacée dans les années 1970, leurs noms n'y figurent plus.
  





Sur cette photo de 1878 (Gilletta), on voit l'église paroissiale et la batterie de part et d'autre de la route de France ; au premier plan, la propriété Gambart.


En 1878, "concession d'une parcelle de terrain dépendant de la route nationale 7 pour l'installation d'une tonnelle au droit de la propriété du concessionnaire Falicon".
Dans les années 1878-1884, "aliénation au bénéfice des sieurs Falicon et Maiffret de terrains provenant des lais et relais de mer". En 1895, sur ces terrains, "amodiation d'une parcelle [...] pour l'installation d'un jeu de boules".


Un peu plus à l'ouest, sur la rive droite du vallon Barla, au nord de la voie ferrée, le Polonais Michel Rohoziński, comte de Leliwa, achète une propriété Girard à la fin des années 1880. Il fait transformer la bâtisse existante en un château d'allure médiévale, qu'il baptise Manoir Leliwa.









Également sur la rive droite du vallon Barla, mais au sud de la voie ferrée, la villa La Luna est longtemps restée à l'abandon (260 promenade des Anglais, photos ci-contre). Finalement acquise par la ville de Nice, elle a été rénovée en 2017-2018.






Francesco Falicon meurt en sa propriété le 27 mars 1889, âgé de 71 ans.
Il est inhumé au cimetière de Caucade (carré 4, CAP 1862).

  






En 1893, les maçons Jean-Baptiste et Bernard Falicon, fils de l'aubergiste Joséphine (veuve d'Ambroise mort suite à sa détention pour homicide, remariée avec Antoine Risso) acquièrent une concession à perpétuité à Caucade, à côté de celle de leur cousin François. Ils la dédient à la "Famille Falicon frères" : on y inhume la petite Jeanne, fille de Bernard, décédée à l'âge de 18 mois.
Bernard et sa mère vivent toujours à l'emplacement de l'ancienne auberge (maintenant 177 avenue de la Californie).

Joséphine, ses deux fils et leurs familles partageront cette sépulture.


 
Joséphine Falicon avec son mari Élie Ferdinand et leurs enfants (et cousins) dans le vallon de la Bournala vers 1900.


Entre 1901 et 1906, Louise s'installe avec son mari Louis Cagnoli (et leurs deux fils ébénistes) dans la nouvelle "rue de Falicon" (qui sera renommée "rue des Combattants en Afrique du Nord" en 1980), de l'autre côté de la voie ferrée. Il s'agit d'une petite allée construite en 1897 sur le vallon Saint-Barthélemy pour relier la gare du "PLM" à celle de la "Compagnie des chemins de fer du Sud de la France" (inaugurée en 1892). Elle porte le nom de la comtesse de Falicon, expropriée pour la réalisation de cette voie de raccordement (voir Le Petit Niçois, 25 mars 1897, p. 2).



En 1907, décès de Joséphine, âgée d'à peine 49 ans. Elle est enterrée dans le caveau familial de son mari Élie Cagnoli, frère de Louis (tout près de son père : carré 2 du cimetière de Caucade).


 


Catherine Laugier veuve Falicon meurt en 1908 au 26 rue de Falicon.
Elle rejoint son mari au cimetière de Caucade.


Par la suite, leurs enfants seront également inhumés dans cette sépulture familiale : notamment Maximin en 1912 ; Antoine en 1932 ; Henriette en 1934 ; Jacques en 1940 ; Louise en 1943 (et son mari Louis Cagnoli dès 1932).




En 1908, l'annuaire de Nice répertorie les Falicon ci-dessus.
Il reste de nombreux cousins actifs sur l'ancienne route de France (rue de France, avenue de la Californie, Caucade), notamment l'entrepreneur maçon Bernard à l'emplacement de l'ancienne auberge.


Au bord de l'avenue de la Californie, sur la façade du n° 112 (Villa Apraxine), il reste une fontaine de marbre portant cette inscription : Donas a beure en achelu ch'an set.



En 1894, la batterie Pauline est démolie et le terrain est récupéré pour prolonger la promenade des Anglais. Un square est aménagé à la place de l'ancien ouvrage de défense. Il prendra le nom du peintre Félix Ziem, mort en 1911 : un buste de l'artiste est érigé dans le jardin.

Sur la carte postale de gauche, on aperçoit au fond la pension-restaurant-garage "Le Minaret" (140 rue de la Californie), à l'architecture exotique. À droite, on peut en voir la salle à manger.



  
J. de Grandières, Nice vue de la plage à Carras, 1879 (Acadèmia Nissarda) ; à droite, les Bains Georges (Walburg de Bray, 1873).


Nice vue de Sainte-Hélène aujourd'hui (2014).



Sources :
Archives familiales
Archives départementales des Alpes-Maritimes
Archives municipales de Nice
Au sujet des Falicon de Sainte-Hélène, voir ce site bien documenté.
Pierre RICHERT sur le groupe Facebook Comté de Nice et son histoire.

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