AntinoüsQuand vint l’aurore, Antinoüs, sur son
navire, Dans l’argent rougeoyant de l’eau se
reflétait, Sous lui, le puissant Nil aux ondes incessantes,
Lui qui a pour destin d’inspirer
l’allégresse ! S’il eût un vœu à faire, lui qui a
le bonheur, Son pays est au sud de l’Ultima Thulé. Pour qui brillaient, la nuit, les astres de
diamant ? Or lui, le bienheureux, quel rêves
faisait-il, Aux rambardes de cèdre enceignant son
navire, Couronnés de sommeil sur leurs sourcils
fleuris, L’appel de l’eau semblait le chant d’une
promise, La vie s’éveille au loin dans les
côtiers hameaux,
[1] La « mer de l’Ouest », c’est-à-dire la Méditerranée.
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Kaarlo Teodor Sulin est né en 1902 à Tyrvää, tout près d'Oulu.
Sa mère, Aleksandra Sulin (1874-1916),
travaille pour le
fermier Adolf Mäkelä. Elle a rencontré au cours de
l'été 1902 un charpentier, Malakias Korkki (plus tard
Laaksonen), qui l'a quittée dès l'automne. Il est
probablement le père de Kaarlo.
Bon élève mais mauvais en
sport et en travaux manuels,
introverti, Kaarlo passe son temps à lire
les livres qu'il emprunte à la bibliothèque.
Après la mort de sa mère
en 1916 (tuberculose
pulmonaire), Kaarlo est pris en charge par ses grands-parents (Paulu
Sulin
et Emma Lindroos), puis par une certaine Hilda Runni. Il peut ainsi
continuer à étudier à Tyrvää. C'est
à cette époque, au lycée, qu'il prend conscience
de son homosexualité. Il se passionne pour la poésie, et
s'intéresse particulièrement à V.A.
Koskenniemi (Veikko Antero Koskenniemi, 1885-1962),
ainsi qu'à Uuno Kailas,
Yrjö
Jylhä, Lauri
Viljanen et Elina Vaara.
Il obtient son diplôme en 1923,
après quoi il fait son
service militaire, au cours duquel il contracte la tuberculose
(printemps
1924).
En 1929, WSOY publie son premier
recueil de poèmes, Kahlittu,
bien accueilli par la critique mais sans grand succès
auprès du public. Il y est question de solitude, du sentiment de
rejet. Dans "Kyttyräselkä puhuu" ("Le bossu parle"), il se
représente en bossu qui aspire à l'amour.
Dans son second recueil, Velka
elämälle (1931),
Sarkia aborde explicitement le thème de l'homoérotisme,
avec un poème intitulé "Antinous".
Le poème qui donne son titre au recueil, "Velka
elämälle", parle d'amour et de désertion : il est
inspiré par l'histoire de sa mère. Ce recueil a toujours
eu une grande popularité en Finlande.
En 1932, Sarkia se met à
traduire de la poésie
française. Il s'intéresse surtout à Leconte de Lisle et à Baudelaire.
En décembre 1933, Sarkia
s'installe à Turku, où
il travaille à la bilbliothèque universitaire. Mais
il s'avère inapte à la vie professionnelle. En
janvier 1934 il tente de se suicider par overdose de
barbiturique.
Le troisième recueil de Sarkia, Unen
kaivo (Le puits du rêve,
1936), est
accueilli avec enthousiasme à la fois par les critiques et par
le public. Il y est
toujours question de mort et de solitude. C'est dans le rêve
que Sarkia trouve une échappatoire.
En 1937, Sarkia part pour un voyage de
plus d'un an en Europe. Il
passe d'abord quelques mois en Suisse, puis va en Italie.
A Rome, il donne une conférence où il critique les
idées d'Hitler. Les carabiniers l'arrêtent
aussitôt...
et le conduisent chez le médecin.
A son retour en Finlande, il est
épuisé. La situation
politique le déprime. Seule une liaison sentimentale,
paraît-il, parvient à lui faire reprendre la plume. Son
quatrième recueil, Kohtalon vaaka
(1943), paraît pendant la guerre de Continuation. Il contient
plusieurs poèmes pacifistes.